CEDEAO, le bourreau du panafricanisme ?

Les récentes déclarations du Premier Ministre Ousmane Sonko au cours de la sa visite au Mali créent la polémique et à juste titre. Sa déclaration laissait supposer que quitter la CEDEAO serait un acte contre le panafricanisme. Ceci est une méprise de la part du PM sénégalais confondant ou feignant confondre panafricanisme et intégration économique régionale.

Le panafricanisme est un mouvement de résistance indissociable de l’indépendance totale, de la dignité et de l’unité des africains du continent et de la diaspora. La CEDEAO ne vise aucun de ces objectifs. Dès lors, il faut d’emblée rappeler que quitter ou rester au sein de la CEDEAO n’a en soit aucun rapport avec le panafricanisme et cela pour au moins trois raisons ci-dessous.

  1. La CEDEAO est une organisation d’intégration économique régionale : Le but et la mission statutaires de la CEDEAO visent essentiellement l’intégration économique de ses Etats membre sans aucun projet d’unité politique ou de protection de la dignité des africains du continent et de la diaspora (Cf. article 3 du traite révisé). Ce but est pertinent et noble mais il ne fait pas de la CEDEAO un instrument au service du panafricanisme. La CEDEAO ne revendique d’ailleurs pas l’idéal panafricain nulle part dans ces nombreuses déclarations et communications. C’est pourquoi ceux qui prétendent que quitter la CEDEAO est contraire à l’idéal panafricain ne peuvent s’appuyer sur aucun texte, plan ou initiative de l’organisation. Ils lui prêtent une intention aux antipodes de ses actes et ceux de ses Leaders.
  2. La CEDEAO est devenue une menace pour la paix et le développement des pays membres : La CEDEAO en se soumettant servilement aux puissances étrangères et à la France en particulier est devenue une menace pour la paix de ses membres. Elle a observé passivement la déstabilisation de la Libye et a activement soutenu le déploiement au Sahel des armées des puissances à la base du chaos libyen. La CEDEAO a été inaudible pendant plus de dix ans d’insécurité au Sahel et s’est laissé exclure, avec une complicité coupable, de tout processus de paix au Sahel. Mais depuis 2022 la CEDEAO a illégalement imposé au Mali puis au Niger des sanctions destinées à asphyxier ses pays en pleine guerre contre le terrorisme. Dans le cas du Niger, la CEDEAO a franchi le Rubicon en menaçant d’agresser ce pays pour détruire son outil de défense et donc le livrer au terrorisme en violation des principes de solidarité et de non-agression entre pays membres stipulés dans son Traité fondateur.  Ces sanctions et menaces sont des actes de guerre qui n’ont profité qu’aux terroristes et aux puissances étrangères donneuses d’ordre.
  3. L’ingérence des puissances étrangères dans les décisions de la CEDEAO tranche avec toute idée de d’indépendance africaine. A plusieurs occasions le Président Français ou son Gouvernement avait annoncé, avec arrogance, des mesures punitives que la CEDEAO devait prendre contre ses membres. L’organisation n’a jamais protesté contre cette pratique d’ingérence mais pire, a elle suivi les injonctions de Paris. Le projet de monnaie commune de la CEDEAO, l’ECO, avait suscité beaucoup d’espoir chez les panafricanistes car cela signifiait inéluctablement la fin du franc CFA, la seule monnaie coloniale ayant cours légal au monde. Contre toute attente, les Présidents Macron et ADO décidaient unilatéralement de muer le FCFA en ECO, sabotant complètement le projet communautaire. La CEDEAO n’a pas non plus protesté contre l’usurpation et le sabotage de son projet monétaire et a au contraire ralenti la mise en œuvre de l’ECO, le vrai ECO.

Depuis le démantèlement de la Fédération du Mali, une véritable initiative panafricaniste, l’AES est la seule organisation qui ambitionne d’avancer vers une association politique poussée des Etats. Elle n’est donc pas un obstacle et encore moins une concurrente à la mission de la CEDEAO. L’idée d’une confédération d’Etat en Afrique dérange plutôt les bailleurs de fonds de la CEDEAO qui ont intérêt à traiter avec des Etats et des organisations faibles et affaiblis. Quitter la CEDEAO n’est donc en aucun cas un acte contraire au panafricanisme car la CEDEAO n’est pas un projet panafricaniste et ne l’a jamais revendiqué.

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